Lorsque vous êtes en charge des questions d’ingénierie, donner à votre équipe toute la transparence nécessaire concernant les objectifs, les plans et les responsabilités reste l’un des plus beaux cadeaux que vous puissiez lui faire. Prashant Pandey, directeur de l’ingénierie d’Asana, s’est récemment entretenu avec Plato, une plateforme de mentorat pour les ingénieurs, sur l’importance de favoriser la clarté de l’information et sur l’impact que cela peut avoir sur les objectifs. Ce blog reprend son analyse et ses quelques conseils, pour définir des objectifs d’ingénierie transparents qui donnent aux membres de l’équipe les clés pour les atteindre, peu importe d’où ils travaillent.
Asana croit en la coordination des efforts par la voie de la clarté. C’est ainsi que nous abordons la création de notre produit et que nous fixons les objectifs à l’échelle de l’entreprise. Nous décomposons la notion de clarté en trois catégories : objectif, planification et responsabilité.
L’objectif correspond au Pourquoi : pourquoi faisons-nous ceci ou choisissons-nous cet objectif ?
La planification correspond au Comment : comment allons-nous réaliser cela ?
La responsabilité répond aux questions Qui et Quoi : qu’est-ce que chacun apporte pour atteindre cet objectif ?
Nous suivons une méthodologie OKR (objectifs et résultats clés) et déterminons des objectifs à l’échelle de l’entreprise grâce à une combinaison de projets ascendants et descendants. Une fois les objectifs identifiés, chaque équipe définit des engagements pour les buts et les résultats clés qui viendront soutenir ces objectifs.
Concernant ce qui a changé, je dirais que la mise en place d’une culture d’ingénierie distribuée et l’adoption du télétravail en raison du confinement sont deux choses très différentes. À l’origine, notre équipe avait été embauchée pour travailler ensemble dans un bureau. Nous avons donc dû faire preuve de réalisme et réévaluer nos possibilités en matière de travail à distance. Dès le départ, nous savions qu’il y aurait des conséquences. Nous avons demandé à nos ingénieurs de prendre quelques semaines pour analyser la situation, afin d’obtenir plus d’informations concernant l’impact éventuel de ces changements sur leur efficacité individuelle et notre rythme de travail collectif. Nous avons ensuite réajusté nos objectifs, soit en les repensant complètement, soit en modifiant le calendrier initialement prévu. Notre engagement en faveur de la transparence, déjà adopté avant la mise en place des mesures de confinement, nous a permis de travailler efficacement tout en restant ambitieux quant à cette nouvelle série d’objectifs.
Le principal obstacle que nous observons chez nos clients consiste en un décalage entre le processus de planification des objectifs et sa réalisation. La plupart des entreprises ont mis en place un processus de planification. Elles prennent le temps de réfléchir à leurs grands objectifs et les exposent dans un document formel, mais une fois ce document ratifié, rien ne le relie au travail effectué. Immédiatement, nous constatons que la réalisation prend une tout autre direction. Les chefs d’équipe et les collaborateurs individuels vont certainement vérifier les objectifs tous les trimestres ou tous les six mois, mais ces derniers sont déconnectés du quotidien. De plus, difficile pour une équipe de savoir où en sont les autres par rapport aux objectifs de l’entreprise, avec pour conséquence des problèmes de coordination.
Prenons l’exemple d’un responsable des ventes qui souhaite voir comment l’équipe d’ingénierie progresse par rapport à un objectif. Il va probablement devoir parcourir des centaines d’e-mails pour y parvenir, ou demander à un chef de projet de s’en occuper et de lui faire un rapport sur la situation. Mais à peine le rapport créé, les données sont obsolètes, car le travail ne s’arrête jamais.
La clarté et la visibilité en temps réel sur les différents services améliore l’agilité de l’entreprise. Vous pouvez ainsi à tout moment prendre des décisions quant aux priorités à donner et à l’affectation du personnel. Les OKR doivent être connectés au travail effectif. Ils doivent être placés au centre de la réalisation et pouvoir être ajustés facilement. En fait, pour moi les meilleurs OKR ne sont pas ceux qui aident la direction à évaluer les équipes : ce sont ceux qui permettent aux équipes elles-mêmes de s’autoévaluer.
D’une manière générale, l’une des principales missions d’un responsable de l’ingénierie consiste à clarifier toute ambiguïté. Si vous vous retrouvez dans cette situation, ne la voyez pas uniquement comme une difficulté, mais surtout comme une opportunité : c’est l’occasion de vous atteler à un projet un peu flou et de donner à votre équipe toute la clarté dont elle a besoin pour y travailler. En créant un plan clair pour votre équipe comme pour votre direction, vous renforcerez considérablement votre crédibilité.
Tout d’abord, il vous faut déterminer le niveau d’adhésion dont vous aurez besoin auprès de l’équipe de direction pour fixer ces objectifs. Ensuite, travaillez à ses côtés pour identifier les objectifs les plus pertinents. Prenons l’exemple de la qualité. Si votre équipe fournit déjà des produits de haute qualité, il n’est peut-être pas judicieux de chercher à fixer un objectif encore plus élevé. Peut-être pouvez-vous simplement définir des indicateurs de base pour mesurer votre travail au fil du temps et repérer facilement les éventuelles difficultés. Il est également important d’identifier le temps et les moyens nécessaires pour atteindre vos objectifs. Si le temps vient à manquer, vous vous exposez à un échec retentissant. Vous pouvez garder cela à l’esprit la prochaine fois que vous définirez des objectifs.
Je prendrais aussi l’habitude de reformuler ces objectifs en tant qu’objectifs d’entreprise. Revenons à notre exemple : si les ingénieurs publient des fonctionnalités de moindre qualité, ils seront amenés à passer du temps à évaluer et corriger des bugs. Ce qui revient ni plus ni moins à perdre du temps et de l’argent, avec des conséquences évidentes pour l’entreprise. Comment reformuler votre objectif de qualité pour communiquer cette idée ? Ce n’est pas facile et requiert un peu de marketing, mais c’est une corde précieuse à ajouter à son arc.
Pour faire court : oui, les équipes devraient toujours disposer d’indicateurs pour savoir si leurs objectifs sont atteints ou non. Généralement, je conseille aux équipes de prendre le temps de bien définir ces indicateurs à l’avance, plutôt que de s’en plaindre à la fin du projet. Attention, tout quantifier n’est pas si simple. Il peut y avoir des objectifs un peu plus vagues, comme : « nous voulons davantage de sécurité que l’an dernier ». Qu’entend-on par là ? Comment quantifier la sécurité ? Cela demande un peu de réflexion. Il n’y a pas de réponse claire et unique, mais il est possible de décomposer la question en plusieurs éléments : obtention de deux nouvelles certifications de sécurité, réduction de X % des violations de données ou achèvement d’un objectif de SLA. Réfléchissez à ce qu’il faudrait mettre en place pour que le projet soit considéré comme une réussite dans les trois à six mois, vous avez là un bon point de départ.
Demandez-leur de les fixer eux-mêmes ! Votre travail de manager ne consiste pas à définir des objectifs à longueur de journée. C’est un processus collaboratif au cours duquel tout le monde participe à définir ensemble ses objectifs. Tirez profit des compétences des membres de votre équipe et encouragez-les à développer ces compétences s’ils ne les ont pas encore acquises.
Pour moi, les équipes de développement devraient toujours être impliquées, au moins dans une certaine mesure. Nous sommes en effet davantage motivés par les objectifs que nous avons nous-mêmes définis. Dans certaines situations, les développeurs ne disposeront pas forcément de tous les éléments de contexte, comme pour le secteur médical par exemple, et il peut être plus difficile pour une équipe de développement de définir des objectifs comparé à un chef de projet doté de l’expertise nécessaire. Mais dans ce cas, je recommanderais d’investir dans la formation afin que tout le monde soit sur la même longueur d’onde. Le produit sera d’autant meilleur que les développeurs en sauront au sujet du problème à résoudre.
À l’échelle de l’entreprise, nous utilisons trois sources d’informations : les retours des clients, notre vision produit et nos capacités matérielles. Nous commençons par recueillir les observations des équipes en contact avec les clients, puis nous les comparons à notre vision produit. Cette entreprise a été fondée sur une vision très claire : simplifier la collaboration. Une fois les objectifs définis à l’échelle de l’entreprise, il appartient à chaque équipe de décider de la façon d’orienter son travail pour les atteindre.
Je commencerais par inviter les ingénieurs à réfléchir à la manière dont ils peuvent convertir les projets qui les passionnent en projets qui font avancer l’entreprise. Ils doivent répondre au Pourquoi : pourquoi ce projet est-il important ? Qu’apporte-t-il à l’entreprise ? Dans la plupart des équipes, il y a de la place pour des travaux passionnants, cela demande juste d’y réfléchir un peu plus. Autre option intéressante, vous pouvez planifier davantage en amont. Si les membres de l’équipe ont vraiment envie de travailler sur un élément de moindre priorité, prenez leur demande en compte et montrez-leur où ce projet peut s’insérer sur la feuille de route, puis revoyez ensemble les objectifs à atteindre en premier.
Faites de vos objectifs d’inclusion et de diversité une priorité pour votre entreprise. Si vous ne maintenez pas cette vision à l’échelle de l’entreprise, ces objectifs passeront au second plan. Je conseille également de résoudre en premier lieu la question de l’inclusion. Assurez-vous que les groupes sous-représentés sont à l’aise et se sentent acceptés. Partez du principe qu’ils ne se sentent pas inclus à 100 %, et commencez par travailler sur ce point.
Ces conseils vous ont inspiré ? Dites-nous comment votre équipe d’ingénierie aborde ces questions dans les commentaires ci-dessous.